Correspondanse (2015-2016)

Série de photographie et de correspondances réalisés par Claudia Chan Tak au cours de ses projets de recherche et création réalisés à travers le monde. À l’aide d’égoportraits, elle documente ses périples en échangeant avec des correspondants sur la culture, les gens, les coutumes, l’histoire et l’architecture des pays qu’elle découvre. Présenté sur les médias sociaux, ce projet invite le spectateur à suivre au fil des jours ses découvertes et ses questionnements et même à y participer en aimant ou en commentant les photos.

ACTE I : En 2015, alors qu’elle était invitée en Belgique pour une résidence de création, Claudia Chan Tak a débuté sa série Correspondanse, une oeuvre à mi-chemin entre la performance cybernétique, la photographie et l’écriture. Sous la forme d’une série photographique d’égoportraits partagés sur les médias sociaux, Chan Tak partageait tout au long de son voyage ses photos et ses anecdotes avec la danseuse Marine Rixhon, une Belge maintenant établie à Montréal, ainsi qu’avec tous les lecteurs qui pouvaient participer à l’échange par des commentaires, des questions ou des suggestions. Plusieurs sujets y étaient abordés, comme l’histoire, la culture, les coutumes et l’architecture, permettant ainsi de tracer un portrait original de ce pays qu’elle découvrait.

ACTE II : En 2016, elle répète l’expérience alors qu’elle s’envole pour la Chine afin de réaliser un documentaire avec l’artiste multidisciplinaire Nans Bortuzzo. Pour ce deuxième acte du projet Correspondanse, alors qu’elle arpente la Chine pour retrouver la maison d’enfance que son grand-père a quitté lors de la seconde guerre sino-japonaise, c’est à son ami d’enfance Albert Yao Su qu’elle écrit afin de trouver des réponses à sa quête identitaire. Elle questionne alors son rapport avec ce peuple, son territoire, sa culture et son histoire qu’elle découvre à chaque jour et qu’elle tente de comprendre afin de mieux se comprendre.

ACTE I
avec Marine Rixhon – BELGIQUE – CANADA

ACTE II
avec Albert Yao Su – CHINE – CANADA

Ce projet s’inspire des correspondances, des carnets de voyage et des journaux personnels d’artistes qui ont toujours captivé Chan Tak par leur façon originale, intime et surtout authentique de raconter une histoire. Avec ce projet, cette dernière explore l’autoportrait comme mode de représentation et n’utilise que les outils disponibles dans son cellulaire pour le traitement de ses images, s’inscrivant ainsi dans une esthétique propre à sa génération où les médias sociaux font partie du quotidien et où les quelques filtres et effets disponibles créent une esthétique unique et reconnaissable.

Pour voir l’album complet de l’artiste et lire les interactions avec le public, cliquez ici.

EXTRAITS

Acte I – 15 juillet 2015
Salut Marine!

Il est 20h03, heure de Liège. Si j’ai choisi un filtre noir et blanc pour ce selfie, c’est pour ajouter un petit côté tragique à ma photo. Je l’ai prise tout juste en sortant du petit cinéma Churchill, alors que je venais de pleurer devant le film Voyage en Chine de Zoltan Mayer. En vérité, s’il n’y avait eu personne dans la salle et que Daryl ne m’avait pas accompagnée, j’avoue que j’aurai braillé ma vie et que ce selfie aurait été beaucoup plus intense!… Mais bon, je me suis gardé une petite gêne surtout qu’on m’avait promis un “périple mi-contemplatif, mi-revitalidant [qui] distille une beauté délicate, dont on ressort étrangement heureux”. En gros, c’est pas si heureux parce que c’est l’histoire d’une Française qui apprend la mort de son fils et qui décide de partir seule en Chine pour récupérer son corps et comprendre sa mort. Ce film est d’un calme et d’une beauté vraiment magiques. Bref, j’ai vécu tout un moment. Tu le sais à quel point je suis dans ma crise identitaire en ce moment et que je me pose des questions sur ma culture malgache-chinoise… Alors t’imagines pas comme ça m’a chamboulée, surtout que la femme est complètement laissée à elle-même en sol étranger et ça m’a vraiment fait pensé à ma propre “panique” quand je suis arrivée toute seule en sol belge! Enfin, c’est assez étrange je dirais, de trouver des réponses à ma quête identitaire alors que je suis à l’autre bout du monde en sol européen… C’est donc un peu émue que je t’embrasse.

De ta petite Claudia en Belgique grâce à #lojiq

Très chère Claudia, c’est ton amie Marine.

J’imagine ta petite bouille de malgache-chinoise-québécoise tout émue dans le fond de la salle de cinéma en train d’écouter ce film qui te ramène à tes origines et je te trouve touchante.

En parlant de films, je pense que celui-ci manque à ta culture belge… https://www.youtube.com/watch?v=TtyEhDgXNX4 Pour remettre un peu en contexte cet extrait, il s’agit de « C’est arrivé près de chez vous », un – faux – documentaire qui met en scène une équipe de télé qui suit un tueur en série. C’est plein de poésie, de cynisme et de répliques cultes. Pour ce qui en est du cocktail, demande à tes amis liégeois de t’expliquer. Il y’a tout un historique à connaître pour comprendre l’absurdité et l’horreur de la scène. Sache, à l’avance, que les belges ont un humour particulier… Sur ce, je t’embrasse,

Une liégeoise expatriée au Québec


Acte II – 10 juillet 2016
Hey Yao (aka Albert)!

Il est 17h38 heure de Pékin. Aujourd’hui est un grand jour, je peux enfin crier : “OH MY GOD! I’M IN CHINA!!! AAAHHHHH!!!”. Après des années d’attente à rêver de ce pays lointain que j’ai idéalisé toute ma vie, je peux enfin vivre mon rêve et visiter ce pays de mes ancêtres. Pour vivre l’expérience à son maximun, j’ai choisi de rester dans un petit hôtel à cour carré situé en plein milieu des Hútòng, quartier magnifique aux petites maisons à pierres grises et aux ruelles sinueuses donnant sur de petites cours intérieures comme dans les films. Mon hôtel est pareil que tous ces grands chefs-d’oeuvre de Kung fu avec lesquels j’ai grandi et j’ai l’impression que des ninjas pourraient venir m’attaquer à tous moments pour me faire faire mes plus belles prouesses de débutante en arts martiaux! D’ailleurs, ma chambre a en tout 4 loquets… est-ce un signe ? Bon, je te laisse, le sommeil du décalage horaire m’appelle et demain, j’ai bien hâte de m’aventurer dans ce beau quartier habité par “le vrai peuple de Chine”. En souvenir de ma première journée en Chine, un selfie devant la porte de ma chambre en hommage au magnifique (mais quand même lourd) film Raise the Red Lantern de Zhang Yimou qui me rappelle d’ailleurs qu’il faut que je m’achète pleins de jolies robes traditionnelles! Allez, à demain!

Signé Chan Wai-Sane
juste le temps de ce voyage rendu possible grâce à l’appui financier du Conseil des arts et des lettres du Québec,
du Conseil des arts de Montréal et du MAI 
(Montréal, arts interculturels)

你好 Claudia!

C’est tout un rêve pour toi qui se réalise! Je suis très heureux de savoir que tu es bien arrivée à Beijing (mon deuxième chez moi!) et que tu t’es installée dans les fameux Hutongs! Effectivement le charme que dégage ces petites ruelles nous permet d’entrevoir un peu le style de vie ancien des pékinois! Avec la croissance rapide de la Chine, un grand nombre de Hutongs ont été rasés pour faire place à des logements plus modernes, mais récemment ceux qui restent sont dorénavant protégés. Si tu as le temps de te perdre un peu dans ces ruelles, je te suggère de visiter la rue Nanluoguxiang! C’est un Hutong plutôt particulier avec beaucoup de petit commerces et de restaurants/cafés/bars qui devient très animé le soir! Comme un de tes amis l’a précédement mentionné ci-haut, la visite de cette ruelle se conjugue bien avec une promenade dans le parc Beihai. Sur ce, j’ai bien hâte de te relire prochainement!

A+, Yao, ton grand frère d’adoption